La Guerre Asymétrique à la lumière de l’Opération « Pilier de Défense » (14-21 Novembre 2012).
Israël contre le Hamas (Bande de Gaza).
L’affrontement entre Israël et le Hamas, sur la Bande de Gaza, à l’automne 2012, a laissé perplexe de nombreux observateurs – médias, Etats, institutions et opinions publiques – quant à son résultat.
Chacun des deux camps a revendiqué la victoire alors que les « points objectifs » étaient peu nombreux.
Comme tous les affrontements asymétriques, ce sont les « points subjectifs » qui semblent prévaloir afin de déterminer qui l’a emporté. Mais avant d’approfondir nos recherches, il convient de définir un certain nombre d’éléments et de présenter un contexte global de la situation locale.
1°) Qu’est-ce qu’une guerre asymétrique ?
Une guerre asymétrique désigne littéralement un conflit du Fort au Faible ou du Riche au Pauvre.
Plus exactement, c’est un affrontement armé entre un Etat doté d’une puissante armée face à une organisation non-étatique dotée d’une milice rustique et faiblement équipée.
Contrairement aux apparences, ce type de guerre existe depuis l’Antiquité.
Mais ce type de conflit connait une résurgence depuis le milieu du XXème siècle.
§ Pourquoi ce type de guerre ?
Un certain nombre « d’organisations » se sont aperçues qu’ils leur étaient impossibles de remporter la victoire dans un conflit « classique », c’est-à-dire l’affrontement sur le champ de bataille.
Parce qu’elles étaient trop « faibles » humainement et matériellement pour l’emporter face aux « forts » dotés de moyens incomparablement plus puissants.
Pour parvenir à leurs fins , elles ont dû élaborer une stratégie basée sur la « guérilla » (mot d’origine espagnol qui désigne littéralement la guerre du paysan , la guerre du fermier) qui consiste non pas à détruire l’armée adverse mais à la harceler en permanence par une série de raids , d’embuscades et/ou d’attentats avec le soutien actif de la population civile , tout en évitant l’affrontement direct qui tournerait inévitablement à une défaite.
Il s’agit donc d’une série d’affrontements indirects qui consistent, à épuiser l’adversaire afin que ce dernier abandonne la lutte et remporter ainsi la victoire.
En de rares occasions, une organisation peut avoir accumulé tant de partisans et de soutien dans la population civile qu’elle peut aussi se lancer dans un conflit conventionnel et affronter les Etats dans un affrontement direct (Doctrine Maoïste)
§ Comment tenir en échec une insurrection ?
De l’autre côté, le rôle du « Fort » consiste à éliminer ce mouvement insurrectionnel – ou du moins à l’affaiblir le plus possible – afin qu’il ne constitue plus, de manière durable, une menace sérieuse.
Sa stratégie contre-insurrectionnelle consiste d’abord à séparer les populations des membres de l’organisation, à rechercher puis à détruire ses forces armées puis des actions politiques et psychologiques afin de gagner les « cœurs et les esprits » de la population .
Mais d’autres stratégies sont également possibles.
Des théoriciens militaires tels que Roger Trinquer ou David Galula ont élaborés ces différentes stratégies et sont les plus reconnues à ce jour comme méthodes de contre-guérilla (L’Armée française est une des premières au monde à avoir élaboré une doctrine de contre-insurrection et ce dès le début du XIXème siècle lors de la Guerre d’Espagne).
§ Quelle est la nature des combats ?
C’est un affrontement dans lequel aucun des adversaires ne peut écraser ou détruire l’autre, parce que ce n’est pas dans l’ordre du possible : une guérilla ne peut anéantir une armée gouvernementale du fait de sa taille qui est beaucoup trop importante pour elle. Inversement un Etat ne peut pas complètement détruire une organisation si elle est profondément incrustée dans le tissu social d’une population (sauf exception).
Le but étant d’affaiblir, de diviser son adversaire au maximum afin de l’amener à cesser ses activités – – ou a minima – arriver en position de force à la table des négociations.
Les deux adversaires alternent les mouvements offensifs et défensifs.
L’avantage de l’armée étatique réside dans sa puissance de feu, sa supériorité numérique, son entrainement et sa maitrise aérienne. Son désavantage réside dans la gestion du temps (on ne peut maintenir indéfiniment une armée en opération de guerre) et dans la volonté politique de ses gouvernants sans oublier le poids de l’opinion publique.
Inversement, l’avantage des insurgés réside dans leurs connaissances du terrain, du fait qu’ils possèdent l’initiative dans ce type d’affrontement et l’éventuel soutien de la population locale. A contrario leurs désavantages résident dans leurs isolements et dans leurs faiblesses matérielles voir humaines (le manque d’effectif).
Chacun des protagonistes tentent de contourner les points forts de l’adversaire et d’exploiter ses faiblesses.
C’est un affrontement qui ressemble non pas à un « jeu d’échec » dans lequel on prend des pions à l’adversaire pour in fine l’écraser, mais au « jeu de go » (les échecs version chinoise) dans lequel les adversaires accumulent les points et ne peut se terminer que lorsque les deux parties décident de passer leurs tours, c’est-à-dire d’abandonner la lutte.
Ce sont l’accumulation de «points objectifs » (Dislocation de l’adversaire, Buts poursuivis, Pertes, Etc.) puis de «points subjectifs » (Aspects Psychologiques, Succès symbolique, Opinion Publique, Etc.) qui déterminent le vainqueur.
§ Des exemples Historiques.
Il existe de nombreux exemples dans lesquels les Etats sont parvenus à vaincre certaines organisations (Conflit Basque, Tchétchénie, Seconde Intifada, etc.).
Et inversement certaines organisations l’ont emporté sur les Etats par usure de leurs adversaires (Guerre du Vietnam).
Il existe aussi des cas particuliers – ou intermédiaires – dans lesquels les Etats ont tenu en échec des organisations sans les avoir éliminés et vice versa (on peut évoquer ici le Conflit Nord-Irlandais , dans lequel l’armée britannique a échoué à détruire l’IRA mais a rendu impossible la victoire de cette dernière ; Ou encore la Guerre d’Algérie ou l’armée française est parvenue à détruire la branche armée du FLN, remportant ainsi une victoire militaire mais subissant in fine une défaite politique).
2°) Quelle est la situation de la Bande de Gaza ?
La Bande de Gaza est une bande côtière de 360 km2, située sur la Mer Méditerranée censée, en théorie, être une partie du territoire palestinien.
Bande de Gaza
§ Le rôle de Gaza dans le conflit Israélo-Arabe
Lors de la création de l’Etat d’Israël le 14 Mai 1948, une coalition de pays arabes (Egypte, Syrie, Jordanie et l’Irak) ont déclaré la guerre au jeune Etat Hébreu, pour des raisons territoriales – afin d’avoir un débouché sur la mer – et moins par solidarité avec les palestiniens ou par antisémitisme véhiculé par une certaine propagande.
Israël sort vainqueur de l’affrontement puisque non seulement cet Etat a survécu mais il a aussi étendu son territoire au-delà des lignes du plan de partage de l’ONU du 29 Novembre 1947.
Néanmoins l’Egypte est parvenue à occuper de la Bande de Gaza (la Jordanie de son côté s’est étendue à la Cisjordanie et Jérusalem-Est).
En 1967 lors de la Guerre des Six-Jours, Israël s’empare de la Bande de Gaza.
Le traité de paix israélo-égyptien de 1979 dispose que Gaza reste sous autorité israélienne (mais ne fait pas partie intégrante de son territoire national, donc c’est une occupation).
En 2005, le gouvernement d’Ariel Sharon décide d’évacuer unilatéralement la Bande de Gaza et de démanteler les colonies juives afin de faire un « geste » envers l’autorité palestinienne mais aussi face à la pression internationale.
De surcroit, le cout de la protection des 8000 colons juifs (occupant le tiers de ce territoire) face à une population de 1,7 million de palestiniens était considéré comme étant disproportionné.
En Juin 2006, les élections législatives palestiniennes donnent le « Hamas » (Mouvement de la Résistance Islamique) vainqueur du scrutin.
§ Qu’est-ce que le Hamas ?
Le Hamas est une organisation islamiste crée en 1987 par Ahmed Yassin et Abdel Aziz al-Rantissi, dont la Charte prône la destruction de l’Etat d’Israël (Article 7), l’expulsion de tous les juifs de la région et la création d’un Etat Islamique.
Il semble que ses créateurs se soit inspiré du mouvement «Hezbollah » parti politique d’inspiration « Chiite » libanais, crée par les Iraniens afin de contrer Israël. A contrario le Hamas est d’inspiration « Sunnite ».
Son but est d’empêcher tout accord israélo-palestinien en vue de conclure la paix : il a refusé les Accords d’Oslo de 1993 prévoyant la cessation du conflit et ne veut pas reconnaitre l’Autorité Palestinienne.
Ce mouvement s’est progressivement implanté dans le tissu social de la population palestinienne de par ses activités humanitaires palliant ainsi au déficit des autorités tant palestiniennes qu’israéliennes.
Du fait du nombre d’attentats commis contre les civils israéliens, ce mouvement est considéré comme une organisation terroriste par un certain nombre d’Etats et d’organisations internationales (ONU, Etats-Unis, Union Européenne, Australie, etc.).
L’un des buts du Hamas est de devenir le principal parti politique palestinien quitte à s’affronter avec l’autorité palestinienne.
En Juin 2007, le Hamas s’approprie le pouvoir par la force sur la Bande de Gaza et évince le « Fatah », parti politique modéré de Mahmoud Abbas (successeur de Yasser Arafat) qui était favorable à la négociation avec les Israéliens.
§ La guerre contre Israël
Israël réagit par un blocus militaire complet de ce territoire.
De son côté, le Hamas procède à des tirs de roquettes « Qassam » (ayant une portée maximale de 30 Km) sur le territoire israélien.
De 2007 à 2008, ce dernier a tiré plusieurs milliers de ce type de roquettes qui commettent peu de dégâts humains (il faut en moyenne 100 roquettes pour blesser un israélien et 400 pour en tuer un, du fait de l’imprécision des tirs et de leurs faibles puissances destructrices).
Mais cela suffit à créer un climat d’insécurité permanent, qui de surcroit gène l’activité économique de cette région.
Pour mettre fin à cette situation, Israël lance une offensive militaire (« Opération Plomb Durci »), fin Décembre 2008-début Janvier 2009, sur le sol même de Gaza afin de stopper les tirs de roquettes – ou au moins en réduire le plus possible.
Le but étant de détruire le plus grand nombre possible de roquettes, de dépôt d’armes, de fabrique de construction, d’élimination ciblée des ingénieurs affectés à cette tâche et de mettre hors-d ‘usage les tunnels reliant Gaza a l’Egypte (par lesquels passent toutes les armes du Hamas).
Apres trois semaines de combat les deux adversaires passent leurs « tours » et proclament un cessez-le-feu.
Le résultat fut dans l’ensemble plutôt favorable – sur le plan militaire – aux israéliens.
Par cette intervention, le nombre de tirs de roquettes fut considérablement réduit : on est passé l’année précédant l’offensive de 3300 roquettes tirées à 300 tirs l’année suivant l’affrontement (soit une réduction de plus de 90% des tirs).
Israël peut alors revendiquer la victoire militaire mais au prix d’un certain opprobre international du fait des pertes civiles causées au cours de cette intervention et de la disproportion des morts entre les deux camps : il y a eu 1400 morts palestiniens (dont une moitié de civils) pour 13 morts israéliens
Comment expliquer une telle différence de pertes ?
On peut commenter ce résultat par la très grande différence de moyens militaires entre les protagonistes.
L’armée israélienne dispose d’une grande puissance de feu et de moyens high-tech (Avions de combat, Drones, Technologie, Chars, Artillerie adapté au combat urbain et spécialisation de la troupe) alors que le Hamas ne dispose « que » d’une simple milice doté d’un équipement en partie rustique et rudimentaire.
Ce qui explique le grand écart de pertes entre combattants israéliens et palestiniens (selon certaines sources, il y a eu 10 soldats israéliens tués pour 700 miliciens du Hamas, soit une différence de 1 à 70).
Roquette Qassam
De surcroit l’affrontement a eu lieu en zone urbaine densément peuplé.
Dans ce contexte et compte tenu du rapport de force entre les belligérants, il n’est pas étonnant qu’il y ait eu autant de morts chez les palestiniens et si « peu » en comparaison coté israélien (Néanmoins le rapport Goldstone de l’ONU accusera les deux adversaires de s’être livrés à des crimes de guerre voire à des crimes contre l’humanité).
Enfin les conditions de vie à Gaza se sont aggravées suite à cette intervention : il y a sur ce territoire exigu de 360 Km2, 1,7 million de palestiniens (ce qui en fait l’une des concentrations humaines les plus élevés au monde : ce qui pose alors des problèmes sanitaires, de tensions sociales et d’anxiété).
Sur ce nombre, 40% de la population active est au chômage et 70% vivent sous le seuil de pauvreté.
3°) La montée du radicalisme dans les deux camps
De cette situation ressort un radicalisme de la population palestinienne (une étude menée en 2002 auprès d’enfants palestiniens âgés de 6 à 11 ans a conclu que 50% d’entre eux préféraient devenir kamikaze plutôt que d’être ingénieur ou médecin).
De l’autre côté, Israël aussi à une partie de sa population qui se radicalise de plus en plus.
Il y a aujourd’hui 8 millions d’israéliens, sur ce nombre 25% sont constitués de partisans orthodoxes voire ultra-orthodoxes pour lesquels les palestiniens n’ont pas droit à un Etat – voire même pour les plus extrémistes, à expulser tout le peuple palestinien de son propre territoire afin de réaliser le « Grand Israël » biblique.
D’ores et déjà dans « Tsahal» (l’armée israélienne), il y a le tiers des soldats et la moitié des officiers qui se réclament de l’orthodoxie.
Dans une génération (soit dans 25 ans), il est possible que cette population devienne majoritaire au sein de la société israélienne (c’est-à-dire former plus de 50% de la population).
Ce radicalisme ne peut qu’exacerber la situation puisque chacune des deux parties semblent préférer le recours aux armes plutôt qu’à la négociation afin de trouver une paix durable (qui passe nécessairement par la création d’un Etat Palestinien).
§ Les pressions judicaires.
Ces tensions ne se traduisent pas seulement sur le terrain politique mais aussi sur le plan judiciaire.
En effet, à la suite de cette guerre, des ONG et des associations pro-palestiniennes, par l’intermédiaire de cabinets d’avocats, ont porté plainte contre l’Etat d’Israël et contre plusieurs de ses dirigeants –civils et militaires- en les accusant de violation du droit de la guerre et du droit humanitaire .
Le but étant de créer un Tribunal Pénal International ad hoc a l’instar de ce qui existe déjà pour le Rwanda ou l’ex-Yougoslavie.
Mais cette tentative n’a pas abouti compte tenu du fait qu’Israël n’a pas ratifié le Statut de Rome (prévoyant la justice internationale) et le Conseil de Sécurité de l’ONU n’a pas ordonné la création de ce tribunal.
Par crainte de représailles judicaires, Israël tient secret le nom de certains de ses responsables militaires ayant participé à cette opération et en limitant les déplacements de ses dirigeants dans certains pays susceptibles d’engager des procédures contre eux (Par exemple, la Belgique ou les tribunaux ont une compétence universelle).
Cet épisode illustre – à sa manière – les nouveaux moyens de pression dans un monde de plus en plus globalisé. Les tensions entre deux Etats peuvent aussi se traduire sur ce terrain.
4°) Un nouvel affrontement Israël-Hamas
Bien qu’un cessez-le-feu fût déclaré, les affrontements – ou les accrochages – ne sont pas rares entre militaires israéliens et miliciens du Hamas.
Ce dernier a pu reconstituer une partie de son stock d’armes depuis l’opération « Plomb Durci » et tire désormais 600 à 800 roquettes par an contre Israël.
Tsahal de son coté, mène de façon ponctuelle des opérations sur Gaza afin de réduire à nouveau ces tirs.
Le 14 Novembre 2012, la « liquidation ciblée » par un Drone d’Ahmed Jabari, le responsable militaire du Hamas par Israël, met le feu aux poudres et provoque un nouvel affrontement (c’est l’opération « Pilier de Défense » pour les israéliens).
Jusqu’au 21 Novembre, le Hamas va tirer 150 à 300 roquettes « Qu’Assam » par jour contre Israël.
Israël de son côté riposte par des attaques aériennes et des tirs d’artilleries qui se veulent « ciblées » (avec parfois des dommages collatéraux).
C’est un affrontement à distance dans lequel aucun des adversaires ne s’affrontent en combat direct ou en combat ouvert (alors que sur zone, il y a 10 000 miliciens du Hamas et 75 000 soldats israéliens prêt à être engagés dans l’affrontement ; cette inégalité numérique est accentuée par la différence qualitative, technologique et de puissance de feu entre les deux parties, ce qui démontre la disproportion des forces dans cette guerre asymétrique).
Chacun des deux camps tentent d’affaiblir, de disloquer l’autre afin de le contraindre à abandonner la lutte.
Le Hamas tente de causer un maximum de dégâts à la fois humains et matériels aux israéliens par ses tirs de roquettes.
Et Israël tente de faire stopper ces tirs ainsi que de détruire les infrastructures de l’organisation (QG, Routes, Ponts, Centre de Stockage, Armes et Liquidation ciblée).
Cependant ce combat n’est pas tout à fait comme les autres.
En effet, de nouvelles caractéristiques sont entrées en jeu.
§ Les nouveaux moyens des protagonistes.
Tout d’abord les Israéliens ont mis en place un nouveau dispositif appelé le «Iron Dome ».
C’est un système destiné à neutraliser les roquettes « Qassam » une fois qu’elles sont lancées : ce dernier est équipé d’un radar qui détecte le départ d’une roquette. S’il calcule que la roquette va frapper un site urbain ou densément peuplé, il va alors lancer un contre-missile destiné à intercepter la roquette afin de la détruire en vol.
Ce nouveau système s’est révélé efficace puisqu’il enregistre un taux de succès de 84% (Sur chacune des tentatives d’interceptions des roquettes).
Son défaut est son prix : pour chaque contre-missile, il y a une dépense d’environ 40 000 dollars, pour comparaison une roquette qu’Assam coute près de 1 000 dollars, soir une différence de 1 à 40 – ce qui illustre bien le concept de lutte du riche contre pauvre dans un conflit asymétrique.
L’autre défaut est qu’il n’intercepte que les roquettes destinées à frapper les villes ou les villages, les autres roquettes ne sont pas interceptées (parce qu’elles sont considérées comme pas « assez » dangereuses et ainsi éviter de trop fortes dépenses).
Les palestiniens de leurs côtés, ont testé un nouveau missile : le « Fajr-5 » livrée par l’Iran, d’une portée moyenne de 75 Km et avec une charge destructrice beaucoup plus importante.
Ces nouveaux missiles, peuvent désormais atteindre des centres plus « vitaux » tel que Tel-Aviv (la capitale économique israélienne avec les principaux ports et aéroports du pays) et Jérusalem (la capitale politique avec les lieux saints).
Ainsi la population israélienne à portée de tir du Hamas à Gaza passe de 1 million à 3,5 millions de personnes (soit presque la moitié de la population du pays).
Parallèlement à l’affrontement militaire, les deux parties se livrent aussi un affrontement médiatique.
Tsahal renouvelle sa technique qui était la sienne lors de l’opération « Plomb Durci » afin d’empêcher les soldats objecteurs de conscience de « fuiter » des informations : tous les militaires impliqués dans cette opération se voient confisquer par les autorités leurs moyens de communications (ordinateur et téléphone portable) , l’obligation de signer des clauses de confidentialité (ce qui signifie l’interdiction de parler à des journalistes sous peine de prison ) et la présence dans les unités de combats de la Police Militaire pour surveiller les hommes .
Système Iron Dome
Le Hamas de son coté, poste sur Internet des vidéos et des photos des civils et enfants palestiniens tués par les tirs israéliens afin de susciter l’indignation dans l’opinion publique mondiale.
Après 8 jours de combat et sous la pression internationale (par l’intermédiaire de l’Egypte), un cessez-le-feu est conclu.
5°) Le Bilan
Chaque camp a revendiqué la victoire. Mais qu’entend-on par le mot « victoire » ?
Aucune des parties n’a écrasé ou détruit son adversaire, tout au plus ils se sont infligés des dommages et des pertes qui à moyen terme seront remplaçables.
Quels « points » (objectifs et subjectifs) les adversaires ont-ils marqués ?
Du côté Israélien :
– Ils ont endommagé voire détruit un certain nombre d’infrastructures du Hamas, ce dernier mettra du temps à les réparer et /ou à les reconstruire (Ce qui limite voire handicape les activités de l’organisation).
– Le Hamas a tiré environ 60% de ses roquettes (1500 sur un stock de 2500) et notamment 90% de ses missiles « Fajr-5 », il lui faudra à nouveau du temps pour reconstituer son arsenal (cessation provisoire de ses tirs contre Israël).
– Les tirs de roquettes ont été relativement bien contrés : sur 1500 missiles tirés, près de 420 ont été interceptés par le système « Iron Dome » (avec un taux de réussite de 84%). Seuls 60 roquettes ont touchées des zones peuplés alors que près de 900 autres se sont écrasés en terrain vague et 150 de plus sont tombés sur la bande de Gaza.
– Le blocus n’a pas été brisé, ni même menacé. Il s’est probablement renforcé puisque les israéliens ont –semble-t-il- détruit la majorité des tunnels clandestins par lesquels passent les arsenaux du Hamas.
– Tsahal a mené une offensive médiatique qui s’est révélée relativement efficace : plus de 80% de l’opinion publique israélienne a soutenu cet affrontement (grâce à un intense discours sur la nécessité de riposter, de se poser en victime face au péril du terrorisme islamique et en faisant appel à une armée de sympathisants sur le net afin de répandre ce message puis d’affirmer la victoire d’Israël dans la lutte). Deux mois après, le gouvernement israélien était reconduit dans ses fonctions lors des élections législatives de Janvier 2013.
– Deux importants chefs du Hamas sont morts : le chef de la branche militaire (Ahmed Jabari) et le chef de la construction des roquettes et missiles (Osama Abdul-Jawad). Ainsi que quatre autres leaders d’une moindre importance (Coup porté au moral de l’organisation voir baisse qualitative de son niveau militaire).
– Et enfin le ratio de pertes, d’après des sources indépendantes, il y a eu 163 morts (dont 91 combattants) et 971 blessés (dont un nombre inconnus de miliciens) du côté palestinien pour 6 morts (dont 2 soldats) et 240 blessés (dont 20 militaires) du côté israélien.
Du côté Palestinien :
– Le pouvoir de nuisance du Hamas s’est accru, puisque la portée de tirs de ses roquettes et de ses missiles a augmenté et est à portée désormais de la moitié de la population d’Israël.
– Les pertes de ses chefs et de ses combattants seront vite remplacés (il y a 200 000 chômeurs en âge de porter les armes à Gaza).
– A moyen terme, ce dernier aura réparé ou reconstruit la plus grande partie de ses infrastructures et de ses tunnels ou emménager ailleurs (les destructions subies ne sont « que » provisoires).
– Deux succès symboliques : le blocus naval est reporté de 3 miles à 6 miles marin (finalement annulé par les israéliens le 22 Mars 2013 qui sont revenus à la limite initiale) et l’attentat à la bombe dans un bus à Tel-Aviv ayant blessé 28 personnes dont 3 gravement (c’est le premier attentat dans cette ville depuis 2006, ce qui tend à prouver que le dispositif de sécurité n’est pas infaillible).
– Avoir intelligemment présenté cet affrontement non pas comme une lutte mais comme un « massacre » des populations civiles par Israël (afin de se poser en victime et ainsi obtenir le soutien de l’opinion publique mondiale et plus particulièrement du monde « Arabo- Musulman »).
– Et enfin avoir gagné en popularité au sein de la population de Gaza.
§ Qui a gagné ?
En guise de conclusion, on peut estimer qu’Israël a remporté une victoire militaire ponctuelle contre le Hamas.
Mais ce succès est relatif, ce n’est que partie remise pour les deux adversaires.
Le Hamas est sorti plus affaibli de la lutte qu’Israël (qui n’a subi presque aucun dommage) mais dès qu’il aura pansé ses plaies, il sera à nouveau opérationnel pour un nouvel affrontement.
Tactiquement, Israël a gagné.
Mais stratégiquement, Israël ne peut pas imposer la Paix, pas plus que le Hamas ne peut gagner la Guerre.
Au vu de la situation, au mieux les israéliens peuvent remporter des succès militaires mais ils sont limités dans le temps et dans l’espace.
Et politiquement, la situation est toujours figée.
Reste à espérer que les deux parties trouvent une solution pacifique pour résoudre de façon durable ce conflit qui dure depuis 70 ans, avant que ne survienne une situation qui risque de se révéler in fine incontrôlable du fait des extrémistes des deux camps …