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La guerre d’Hannibal contre Rome (219 à 202 avant JC).

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La guerre d’Hannibal contre Rome (219 à 202 avant JC).

 L’impossibilité stratégique de remporter la victoire malgré des succès tactiques.

 

Cette guerre a beaucoup marqué les esprits à l’époque et a fait l’objet de nombreuses études. Elle a eu d’importants impacts et comporte de nombreux enseignements. Malgré sa défaite finale, Hannibal Barca reste au centre de cette histoire tant en raison de ses prouesses militaires que pour son charisme.

Il a réalisé de nombreux exploits pour l’époque : la traversée des Alpes en plein hiver et le fait d’avoir vaincu les romains à de nombreuses reprises (notamment à Cannes).

Notre projet est de démontrer que malgré sa volonté et ses qualités, Hannibal avait peu chance de l’emporter contre Rome en raison de sa situation stratégique et des différents rapports de force.

 

1°) L’animosité entre Carthage et Rome

 

Sous l’Antiquité, il existait deux grandes puissances sur le bassin méditerranéen.

D’un côté, il y avait Rome fondée en 753 avant JC, par Romulus et Remus.

Et de l’autre, il y avait Carthage fondée vers l’an 800 avant JC, par les Phéniciens.

Au troisième siècle avant notre ère, Rome – qui était à l’époque une République – contrôlait la plus grande partie de l’Italie et Carthage contrôlait les limites méridionales de la partie ouest de l’Afrique du nord (de la Tunisie au Maroc d’aujourd’hui en passant par l’Algérie).

Cependant, il s’est avéré que ces deux nations – pourtant relativement distantes – ne pouvaient pas cohabiter pacifiquement. Tout simplement, parce que l’Ouest de la Méditerranée n’était pas assez grand. En effet, Carthage avait besoin d’un grand territoire à la fois terrestre et maritime pour développer son commerce (sur lequel reposait une grande partie de son économie). Cette situation était mal perçue par Rome qui voyait les frontières de Carthage se rapprocher de plus en plus des siennes et qui contrecarrait ses propres désirs d’expansion territoriale.

Devant cette situation, il apparaissait clair que tôt ou tard la guerre allait éclater entre ces deux puissances au moins pour le contrôle de la Méditerranée occidentale.

L’affrontement commença en 264 avant JC, connu sous le nom de « Première Guerre Punique » (il y aura au final trois guerres entre Rome et Carthage ; les romains appelaient les Carthaginois sous le nom de « puniques » à cause de leurs ancêtres phéniciens).

 

  • La guerre

 

En 264, Carthage débarqua sur l’Ile de la Sicile – qui était à l’époque un royaume indépendant – dans un but de conquête territoriale. Rome a alors considéré cette invasion d’un territoire si proche de ses frontières comme une menace pour ses propres intérêts. Elle a alors mobilisé son armée afin de bouter les Carthaginois hors de l’ile et s’approprier ce territoire.

Il s’ensuivit une guerre qui dura 23 ans, de 264 à 241 avant JC. Rome remporta la victoire et Carthage dû rebrousser chemin. Ce fut un traumatisme pour la population Carthaginoise d’avoir perdu cette guerre et plus particulièrement pour ses chefs militaires.

Les raisons de cette défaite tiennent au fait que Carthage s’est contentée d’adopter une stratégie à la fois défensive et passive, ce qui a conduit à sa perte. De surcroit, l’armée Carthaginoise était surtout composée de mercenaires (Carthage préférait recourir au mercenariat plutôt qu’à ses propres citoyens) qui n’étaient pas en mesure de rivaliser avec les soldats romains (qui étaient eux des professionnels).

Dans ce contexte, un général carthaginois, Hamilcar Barca, – le père d’Hannibal – décida qu’un jour son pays prendrait sa revanche contre Rome.

Mais dans l’intervalle, il fallait restaurer la puissance de Carthage et préparer ses fils à la future guerre.

 

2°) Le personnage d’Hannibal Barca

 

Hannibal naquit à Carthage, en 247 av JC, fils d’un général aristocrate déterminé à rétablir à terme le rapport de force contre Rome. En 238, son père décida de quitter la ville de Carthage pour l’Espagne – aux mains de différentes tribus – afin de conquérir ces territoires pour que sa patrie puisse recouvrer sa puissance. Hannibal a alors neuf ans.

D’après la légende, son père – avant de l’emmener avec lui – lui aurait fait prêter un serment devant les dieux (les Carthaginois étaient polythéistes). Par ce serment, Hannibal jurait de vouer une haine éternelle à Rome et de ne laisser aucun répit aux romains quand la guerre éclaterait.

On sait peu de choses de ce qui arriva par la suite durant son adolescence. Mais on sait que le patriarche enseigna à Hannibal et à ses frères l’Art de la guerre (Hannibal avait trois sœurs ainées issues d’un premier mariage puis deux frères cadets issus d’un second lit dont il était l’ainé).

Pendant 10 ans, son père conquit une partie du Sud de l’Espagne et gouverna en autocrate. Il semble qu’Hannibal accompagnait son père durant ses campagnes militaires. Ce mode de vie, vécu très jeune l’a sans doute familiarisé avec le monde militaire et lui a permis de développer ses capacités de stratège.

Mais en 228, son père meurt au cours d’un siège. Hannibal a alors 19 ans. Malgré son jeune âge, il prend le commandement de la troupe (composée de mercenaires) accompagné de ses deux frères et poursuit la conquête de l’Espagne. Pendant les neuf années qui suivirent, il a mené plusieurs campagnes militaires grâce auxquelles il s’est approprié la moitié sud de l’Espagne.

Tandis qu’une partie de la moitié Nord était déjà dans sa sphère d’influence. Mais une ville lui résistait encore – la ville de Sagonte – située à l’Est de l’Espagne. Or cette ville se trouve sous protection romaine mais Hannibal décide de l’assiéger malgré tout.

Rome met alors en garde Carthage : elle doit soit lever le siège de Sagonte, soit livrer Hannibal aux autorités romaines afin qu’il puisse être jugé, sinon ce sera la guerre. Carthage refuse et Sagonte –après sept mois de siège – est prise. Au pied du mur, Rome déclare la guerre à Carthage.

C’est le début de la Seconde guerre Punique.

Nous sommes en 219 av JC, Hannibal n’a alors que 28 ans.

 Buste supposé d’Hannibal Barca

3°) La Guerre contre Rome

 

Hannibal ne souhaitant pas répéter les erreurs du passé, décide de ne pas adopter une stratégie défensive mais au contraire d’avoir une attitude offensive contre Rome.

Début 218, il monte alors une grande armée destinée à marcher en territoire romain et prendre Rome. Lors de l’arrivée du printemps, Hannibal a réuni une armée de plus de 100 000 hommes (90 000 fantassins et 12 000 cavaliers ainsi que 37 éléphants de guerre). La composition de son armée est hétéroclite : il y a des Carthaginois, des Berbères, des membres de tribus Africaines et Espagnoles.

Chacun de ses groupes à des langues et une culture de guerre différentes mais ils sont soudés par la personnalité charismatique d’Hannibal qui leur a donné un but commun : vaincre Rome.

 

  • La marche vers l’Italie

 

Vers le mois de Mars 218, Hannibal lève le camp et se dirige vers le territoire romain.

La distance à parcourir à pied est immense : il faut traverser le nord de l’Espagne, franchir la chaine des Pyrénées, longer la Cote d’Azur – tout en traversant le Rhône – et enfin atteindre l’Italie. Parcourir une telle distance avec une aussi grande armée et des éléphants et ce en terrain hostile et malgré les intempéries exigent des qualités organisationnelles et de meneur d’hommes hors-pair.

Pendant de longs mois, les hommes d’Hannibal vont progressivement triompher de chacun de ces différents obstacles. Néanmoins, ils subissent de très lourdes pertes : il y a les attaques de tribus tout au long du parcours, les conditions climatiques, les morts par épuisements, la maladie, le manque d’eau et de nourriture ravagent la troupe sans compter les désertions (Hannibal perd environ 60 000 homes).

Il devient alors clair que seuls les plus robustes – ou les plus chanceux – pourront arriver en Italie. Après six mois de marche, Hannibal arrive aux portes de l’Italie. La logique voudrait qu’il continue de longer la Cote d’Azur mais il faut pour cela prendre une à une les différentes villes contrôlées par les romains et leurs alliés (et notamment Marseille).

Du fait de la fortification de ces villes et de leurs capacités à tenir un long siège, Hannibal estime qu’il ne peut pas se permettre une guerre de position. Il opte alors pour une stratégie d’évitement particulièrement audacieuse pour l’époque : franchir les Alpes.

A l’époque, seules quelques tribus pouvaient parcourir un tel chemin. Or, Hannibal va les franchir avec une armée de 40 000 hommes et des éléphants. De surcroit nous sommes en Hiver. Mais malgré toutes ces difficultés, Hannibal décide de forcer le passage malgré tout.

L’ascension débute à la mi-octobre 218. Au bout de deux semaines de manœuvres, d’intempéries mais aussi d’exploits sportifs, Hannibal parvient avec son armée à entrer en Italie, sur le sol romain.

Il lui aura fallu sept longs mois pour atteindre son objectif. Des 100 000 hommes au départ, il n’en reste que 26 000 à l’arrivé. Et la moitié des 37 éléphants ont été perdus.

 

Hannibal et son armée franchissant les Alpes 

 

  • L’offensive d’Hannibal.

La nouvelle de l’arrivée d’Hannibal en Italie provoque un électrochoc à Rome : les romains sont pris à contre-pied et modifient brutalement leurs plans.

A l’origine, ils avaient mobilisé deux armées : la première en Sicile pour attaquer Carthage sur le sol africain et une seconde armée dans le nord du pays pour envahir l’Espagne.

Ces deux armées abandonnent leurs positions respectives pour se diriger vers l’armée d’Hannibal afin de le détruire. Ce dernier se trouve alors dans une situation particulièrement inconfortable : il a perdu les trois-quarts de ses hommes durant le trajet, les survivants sont épuisés et le ravitaillement manque.

Il va alors parier sur le jeu des alliances : à l’époque Rome n’est pas encore un Empire, elle a la suprématie sur l’Italie après avoir fait alliances avec certaines provinces ou royaumes indépendants. De surcroît certaines tribus du nord de l’Italie (comprenant de nombreuses tribus gauloises) n’ont pas encore été soumises.

Hannibal déploie alors toutes ses capacités politiques pour persuader ces entités de se joindre à lui dans un combat commun contre Rome. Après d’âpres négociations, certaines d’entre-elles acceptent de se joindre à lui mais la majorité hésite. Il va alors lancer son armée à la rencontre des romains pour faire basculer le rapport de force et convaincre les réticents de le soutenir.

A la fin de l’année 218, deux grands succès vont être remportés.

La première confrontation avec les romains se déroule à Ticinus au nord de l’Italie – en Novembre 218 – ou les éclaireurs d’Hannibal détectent l’avant-garde de l’armée romaine.

Il décide alors de sauter sur l’occasion et parvient à tendre une embuscade aux milliers de cavaliers romains avec sa propre cavalerie Numide et l’écrase en quelques heures. Première victoire d’Hannibal sur les Romains.

Le second combat eu lieu, un mois plus tard en Décembre, quand le gros de l’armée romaine composée de 40 000 hommes parvint à la rencontre de l’armée d’Hannibal forte de 30 000 hommes sur le fleuve de la Trébie.

Le chef carthaginois décida d’utiliser la ruse contre les romains en faisant une attaque de diversion contre leur camp de base afin de les inciter à l’attaquer sur le terrain de son choix. Ils mordirent à l’hameçon et tête baissée se précipitèrent contre les hommes d’Hannibal qui les attendaient sur les hauteurs du champ de bataille. Sauf que profitant de la végétation des lieux, les Carthaginois avaient disposé une partie de leur armées dans les forêts et les bosquets, tandis que la majorité de leurs soldats étaient visibles des Romains et attendaient le choc.

Quand les Romains attaquèrent les premières lignes de front –dépassant ainsi les soldats dissimulés, Hannibal ordonna aux soldats embusqués de prendre les Romains par leurs flancs. L’armée romaine fut alors prise en étau, céda à la panique et fut taillée en pièces par les Carthaginois. A l’issue de l’affrontement, sur les 40 000 soldats Romains, 15 000 ont été tués et 15 0000 de plus fait prisonniers alors que les Carthaginois n’ont perdu que 3000 hommes.

Ce fut une grande victoire pour Hannibal qui détruisit la réputation d’invincibilité des Romains et de nombreuses tribus se rallièrent à lui grossissant ainsi les rangs de son armée.

Après avoir fait une « pause » durant l’hiver, au début de 217, il reprit l’offensive vers le Sud en se rapprochant de Rome. Cette dernière lui envoya alors une seconde armée pour le stopper.

La rencontre eu lieu au Lac Trasimène situé au centre de l’Italie.

Hannibal monta alors une embuscade considérée comme l’une des mieux réussie de l’Histoire militaire : à l’arrivée de l’armée romaine composée de 25 000 hommes longeant la route du lac , il dissimula la totalité de ses 40 000 combattants dans la végétation et une fois estimé que le moment idéal était arrivé , il donna l’ordre d’attaquer .

Les romains furent pris par surprise et une nouvelle fois furent défaits.

La totalité des romains furent éliminés (15 000 morts et 10 000 prisonniers) et le commandant-en- chef romain tué.

Bataille du Lac Trasimène

 

  • La bataille de Cannes

 

Hannibal – après ces trois victoires consécutives – décida de ne pas se retourner contre la ville de Rome. Il n’avait pas encore suffisamment de moyens à la fois humains et matériels pour pouvoir la prendre.

Il se dirigea alors vers le sud de l’Italie afin de s’emparer des récoltes pour nourrir son armée et permettre à cette dernière de mieux s’acclimater (les Carthaginois étaient plus disposés au climat du sud du pays qu’au nord).

A Rome, au bout d’un an de longues et difficiles négociations, il fut décidé d’en finir une fois pour toute avec Hannibal et de lancer contre lui, la plus grande armée que la République romaine ait jamais constituée. Une troupe composée de 90 000 hommes fut mobilisée et envoyée dans le sud contre les 50 000 combattants Carthaginois.

La confrontation eu lieu à Cannes le 2 Aout de l’an 216 avant JC. Les romains ont une supériorité numérique de 2 contre 1 environ. Ils se trouvent sur leurs propres territoires – et ne voulant pas tomber dans une énième embuscade -ils décidèrent de combattre dans une vaste plaine sans colline et sans végétation. De surcroit les Romains sont très déterminés à vaincre leur terrible ennemi.

Mais encore une fois Hannibal va les prendre par surprise …

A l’époque, l’ordre de bataille des armées est la suivante : l’infanterie est au centre, la cavalerie est sur les flancs et la réserve derrière (soit pour exploiter une percée soit pour combler une brèche).

Hannibal dispose d’un avantage sur les romains : sa cavalerie. Il dispose de 10 000 cavaliers expérimentés et bien entrainés alors que les Romains n’en n’ont que 7000 moins bien formés. Il sait aussi que les Romains vont jouer à fond de leur supériorité numérique : ils vont masser le plus grand nombre de fantassins au centre afin d’enfoncer sa ligne de front qui sera en grande infériorité numérique et qui sera inévitablement soit repoussée (sous le poids du nombre) soit percée puis détruite.

Le chef Carthaginois va alors « jouer » à la fois sur cet avantage et sur cet inconvénient. Le coup de génie d’Hannibal est qu’il va contourner les points forts de l’adversaire et exploiter ses faiblesses de façon optimale.

Il va même faire de la plus grande force de son adversaire – le nombre – sa plus grande faiblesse, en la retournant contre lui. Sa stratégie est la suivante : il dispose de 50 000 hommes, il va les répartir en trois différents corps. Il place au centre son infanterie légère composée de gaulois et d’espagnols comptant 20 000 hommes, qu’il déploie en forme de V inversé.

A l’arrière, il place son infanterie lourde composée d’africains comptant 20 000 hommes, qui sont répartis de façon perpendiculaire par rapport à la ligne de front sur chaque côté (équitablement réparti entre le côté droit et le côté gauche, soit 10 000 soldats chacun).

Et sur les flancs il dispose sa cavalerie composée de 10 000 hommes qu’il répartit inégalement : les deux tiers des cavaliers (6600) sur le flanc gauche et le tiers restant (3300) sur le flanc droit.

Son but est d’encercler puis de détruire l’armée romaine.

 

 

En répartissant son infanterie légère en forme inversé du V (ou en forme inverse d’un croissant), il cherche à inciter les Romains à l’attaquer à l’extrême centre de son dispositif.

L’infanterie Romaine composée de 83 000 hommes avancera vers la ligne de front Carthaginoise composée seulement de 20 000 soldats.

A 4 contre 1, Hannibal sait que cette ligne va progressivement « plier » sous le nombre.

Cela signifie que sous l’effet du poids des hommes et de la masse, la formation en forme de V inversé ne va pas pouvoir tenir. Puisque les romains attaqueront au centre, la ligne de front se transformera progressivement de sa formation initiale en ligne continu.

Puis finalement, la formation aboutira en formation V (mais à l’endroit cette fois) puisque les romains s’engouffreront dans la brèche.

Puis c’est à ce moment précis qu’Hannibal activera son piège : il donnera l’ordre a l’infanterie lourde – postée à l’arrière de la ligne de front et équitablement répartie sur les côtés gauche et droit – de passer à l’action. Chacune des formations devra avancer sur son propre coté puis prendre les romains sur chacun de leurs flancs.

Ainsi les romains seront cernés de trois côtés : à l’avant, ils seront piégés dans le V de l’infanterie légère carthaginoise tandis que l’infanterie lourde les prendra sur leurs flancs respectifs.

Dans l’intervalle, la cavalerie d’Hannibal lancera l’assaut sur la cavalerie romaine répartie sur les côtés.

Sur le flanc gauche, la cavalerie carthaginoise étant deux fois plus nombreuse que la cavalerie romaine (6600 contre 3500) et mieux entrainée que cette dernière devrait facilement l’emporter soit en la détruisant soit en la mettant en fuite.

Une fois les cavaliers Romains défaits, la cavalerie Carthaginoise devra traverser les arrières de l’armée romaine pour porter assistance à leurs collègues du flanc droit qui se battent à armés égales contre l’autre cavalerie romaine (3300 contre 3500).

Pris en étau, les derniers cavaliers romains seront défaits.

Une fois la cavalerie ennemie détruite – ou mise en fuite – les cavaliers Carthaginois se réuniront à l’arrière de l’armée Romaine déjà cernée de trois côtés, formeront une longue ligne puis ils prendront à revers l’infanterie romaine.

Ainsi l’armée Romaine sera complétement encerclée. Attaqués de toutes parts les soldats Romains seront encastrés les uns sur les autres et perdront leur cohésion et leurs discipline. Puis ils seront progressivement « massacrés » jusqu’à ce que la destruction complète.

Ce plan nécessite une parfaite coordination entre les différents corps et des nerfs d’acier, la moindre défaillance pouvant nuire à la structure d’ensemble.

 

 

La bataille commença et le plan se déroula comme prévu.

A la fin de la journée l’armée Romaine fut complétement détruite.

Sur les 90 000 soldats Romains, 50 000 ont été tués et 20 000 de plus fait prisonniers (selon l’historien romain Tite-Live dont les chiffres approchent le plus la réalité).

Les Carthaginois n’ont perdu « que » 6000 hommes sur 50 000. Le ratio de pertes s’établit à 10 soldats Romains pour 1 soldat Carthaginois.

La victoire est totale pour Hannibal (cette bataille est aujourd’hui considérée comme un chef-d’œuvre et enseignée dans les académies militaires du monde entier).

 

4°) L’échec stratégique d’Hannibal

 

Que va faire Hannibal de cette extraordinaire victoire ?

Rome n’a plus d’armée à lui opposer – du moins dans l’immédiat – et la route de Rome est libre. Mais à la stupéfaction de certains de ses généraux, Hannibal refuse de marcher sur Rome. Il est persuadé que Rome est à bout et n’aura pas d’autre choix que de capituler – ou a minima – il arrivera en position de force à la table des négociations. Mais cela ne se produira jamais.

C’est l’un des épisodes les plus controversés de l’Histoire : beaucoup de personnes ont argué par la suite que si Hannibal avait marché sur Rome, il aurait pris cette dernière et remporté du même coup la guerre.

Mais les choses sont moins simples qu’elles n’y paraissent.

En fait, après de nombreuses recherches, il apparait évident que même après la bataille de Cannes Hannibal n’avait aucune chance de prendre Rome.

De nombreux arguments plaident pour cette théorie :

 

  • Pour assiéger une ville, il est indispensable d’avoir des armes sièges (c’est-à-dire des béliers, des catapultes, des tours d’assaut, etc.). Or Hannibal n’en dispose pas et personne en Italie ne peut lui en fournir. Dans cette perspective, c’est déjà cause perdue que de vouloir assiéger une ville. Comment prendre une place forte si on n’a pas déjà les moyens techniques en amont de le faire ?

 

  • Si l’on doit assiéger une ville, il est indispensable de ne pas avoir d’ennemi à l’affut. Or Rome dispose encore de troupes et de nombreuses cités-alliés dans la région qui peuvent envoyer des hommes pour briser le siège. Malgré leurs pertes, les romains gardent la supériorité numérique. Et au lieu d’être l’assiégeant, Hannibal deviendra l’assiégé. Dans cette situation prendre Rome relève de l’impossible.

 

  • Si par miracle, Hannibal parvient à encercler Rome avec succès et à repousser toutes les tentatives de libération extérieure, un autre problème se pose : le ravitaillement par mer de la ville. En effet, la ville sera peut-être encerclée au niveau terrestre mais au niveau maritime, Rome peut être approvisionnée par voie de mer, ce qui lui permettra d’obtenir le minimum vital pour ne pas succomber. Ainsi Rome a les moyens de tenir un long siège alors que les propres moyens des Carthaginois sont limités.

 

  • Et quand bien même Hannibal aurait pris Rome, cela ne signifie pas qu’il aurait nécessairement gagné la guerre. Cela aurait sans doute été un rude coup pour les Romains mais cela n’aurait pas empêché la classe dirigeante de Rome de fuir et d’établir un nouveau lieu de pouvoir afin de poursuivre la lutte.

 

Dans ces conditions il apparait clair qu’après Cannes, il n’y avait qu’une seule bonne raison de marcher sur Rome (la Capitale) mais que de nombreuses autres incitaient à ne pas y aller (évoquées ci-dessus).

 

5°) La nouvelle stratégie de Rome

 

Bien qu’assommés par toutes leurs défaites successives, les Romains n’entendent pas accepter la défaite.

La classe dirigeante Romaine nomme alors un « dictateur » Fabius Maximus déterminé à remporter la victoire finale contre Carthage et plus particulièrement contre Hannibal. Ses premières mesures consistent à reconstruire l’armée romaine.

Pour cela, il abaisse l’âge de la conscription à 17 ans (au lieu de 21 ans), il réduit les qualifications requises pour entrer dans l’armée, il décrète que tout esclave et que tout prisonnier seront affranchis s’ils combattent aux côtés de Rome. Il fait même dépouiller des temples les armes et les armures que les romains ont donnés en offrande à leurs dieux (ce qui était considéré comme un sacrilège à l’époque, ce qui en dit long sur la détermination des romains à vaincre).

Pour financer ces opérations il dévalue la monnaie romaine en la divisant par 6 (en temps de guerre, le fait de dévaluer la monnaie procure un avantage économique pour soutenir l’effort national).

Mais surtout, il adopte une nouvelle stratégie militaire face à Hannibal.

Désormais il faut à tout prix éviter l’affrontement direct avec lui, c’est-à-dire ne pas lui livrer bataille.

Pour le vaincre, il faut l’isoler de ses renforts éventuels d’Espagne ou d’Afrique, attaquer ses lieutenants sur le sol Italien, construire des fortifications au sud du pays afin de le priver de tout mouvement majeur, l’obliger à mener une guerre de position plutôt qu’une guerre de mouvement dans laquelle il s’épuisera progressivement et enfin « grignoter » les effectifs de son armée (qui dispose de ressources limitées).

En fait, c’est une stratégie d’attrition qui consiste à épuiser l’adversaire pour in fine le vaincre. Hannibal de son coté, pour les raisons que nous avons déjà évoquées, n’est pas en mesure de détruire Rome.

Sa stratégie consiste à pousser Rome à la capitulation – ou à l’amener à la table des négociations – pour cela il faut rompre les alliances diplomatiques de Rome sur le sol romain et remporter toute une série de victoires locales qui aboutiront nécessairement – selon Hannibal – à une victoire stratégique.

Ce sont donc des stratégies d’attritions mutuelles entre les deux camps.

Pendant 13 ans, de 216 à 203 avant JC, les deux camps vont jouer de cette stratégie l’un contre l’autre.

Sauf qu’Hannibal n’a aucune chance de l’emporter à ce jeu-là. Il est complétement isolé en Italie (Rome a la maitrise totale des mers), bien que certaines cités l’aient rejoint dans la lutte, la majorité d’entre-elles sont restées fidèles au pouvoir romain. Rome dispose d’une écrasante supériorité numérique contre lui, de l’ordre de 3 contre 1.

En 209, Rome décide d’envoyer des troupes en Espagne afin de s’emparer des terres précédemment conquises par Hannibal. En quelques années l’ensemble du pays tombe entre leurs mains. Et en 203, Rome débarque sur le sol africain pour affronter directement Carthage.

La classe politique Carthaginoise supplie Hannibal de rentrer pour sauver le territoire national. Ce dernier accepte et quitte le sol Italien après 15 ans de lutte contre Rome.

Les romains en forçant Hannibal à quitter leurs territoires prouvent la pertinence de leurs stratégies. Le chef Carthaginois s’est progressivement affaibli ainsi que son armée au cours de cette nouvelle forme de guerre menée par Rome. A tel point que durant 4 ans, de 207 à 203 avant JC, Hannibal a été forcé de se retirer à l’extrême pointe de la botte italienne parce qu’il n’avait plus les moyens de faire face.

Néanmoins, il ne faudrait pas croire qu’il fut passif depuis Cannes.

Hannibal a constamment cherché à mettre en échec la stratégie romaine et lui a d’ailleurs porté des coups sérieux. A plusieurs reprises, il est parvenu à surprendre et à détruire des armées romaines qui s’étaient imprudemment avancées sur son territoire (que ce soit à Tarentum et à Silarus en 212, ou à Herdonia en 210). Il a réussi à prendre plusieurs villes et n’a subi aucune défaite majeure contre Rome lors des différents combats qui ont eu lieu (il a même assiégé Rome en 211).

A tel point que lorsqu’il est parti pour Carthage en 203, 12 des 30 provinces romaines ont signalé à Rome qu’ils leurs étaient impossible de poursuivre la lutte tant elles étaient exsangues que ce soit en hommes et en finances. De nombreuses autres provinces Romaines étaient aussi au bord de la rupture.

La stratégie d’Hannibal a donc porté ses fruits contrairement à ce que l’on pourrait imaginer.

Mais il est sorti de la lutte nettement plus affaibli que Rome, ce qui signifie que c’est cette dernière qui l’a finalement emporté contre lui.

 

6°) La défaite finale de Carthage et d’Hannibal

 

Après être rentré à Carthage à l’âge de 44 ans- il l’avait quitté à l’âge de 9 ans – Hannibal prend la tête de l’armée Carthaginoise pour affronter (à nouveau) l’armée romaine.

En 202, sur la plaine de Zama à 200Km au sud-est de Carthage, l’ultime bataille a lieu mais c’est déjà joué d’avance : Hannibal perd la bataille face aux Romains compte tenu de la faible valeur qualitative des troupes Carthaginoises face à des Romains ayant retenu les leçons des différentes batailles livrées contre lui. Pour éviter que la ville ne soit rasée par les Romains, Carthage accepte de capituler puis de céder aux exigences de Rome.

Les conditions de Rome pour la paix sont drastiques :

 

  • Carthage doit accepter la perte de l’Espagne au profit de Rome

 

  • Les Carthaginois doivent verser 10 000 talents d’or en compensation à Rome et ce sur une période de 50 annuités (ce qui correspond à plusieurs fois leurs PIB annuels)

 

  • Ils doivent livrer la totalité de leur flotte de guerre (sauf 10 vaisseaux), livrer aussi leurs éléphants de guerre et libérer la totalité des prisonniers Romains

 

  • Et enfin Carthage doit s’engager à ne pas livrer la guerre contre une puissance étrangère sans avoir reçu au préalable l’autorisation de Rome.

 

Carthage a donc perdu la guerre et elle en a payé le prix fort.

 

  • Pourquoi Hannibal a t’il perdu la guerre ?

 

Les raisons de la défaite finale d’Hannibal sont diverses :

 

  • La détermination de la classe politique Romaine à ne jamais s’avouer vaincue même aux pires moments de la guerre

 

  • La capacité de Rome à mobiliser en permanence des armées de masse (en moyenne les romains avaient 20 légions de disponibles sur le terrain).

 

  • La maitrise totale des mers par Rome

 

  • Le fait que le réseau d’alliances fut dans l’ensemble fidèle au pouvoir Romain

 

  • Le manque de moyens et de soutiens à disposition d’Hannibal

 

  • Et la stratégie militaire adoptée par Rome

 

Dans tous les affrontements, il est infiniment préférable de disposer d’une supériorité stratégique plutôt que d’une supériorité tactique.

Parce que la première confère un avantage permanent en temps de guerre alors que la seconde ne confère qu’un avantage ponctuel qui ne saurait  remettre en cause le rapport de force global. Dans cette situation, malgré son génie militaire, Hannibal n’avait aucune chance de l’emporter car des résultats locaux aussi brillants soit-il (comme à Cannes par exemple) ne peuvent mettre en échec un système mis en place contre lui.

Hannibal fut par la suite exilé de Carthage où il vécu comme un Hermite passant de province en province à travers la Méditerranée. Il finit par se suicider en 183 avant JC, lorsqu’il fut le sur point d’être capturé par des soldats Romains venus l’arrêter pour le transférer à Rome afin d’être exposé comme un trophée puis d’être exécuté. Hannibal a choisi le suicide plutôt que de procurer à son ennemi héréditaire la satisfaction de l’avoir lui-même éliminé.

A la suite de ce conflit, Rome acquit la supériorité totale sur le bassin méditerranéen et finira par détruire complétement Carthage en l’an 146 avant JC à l’issue de la troisième (et dernière) guerre punique.

La guerre de cent ans (de 264 à 146) entre Carthage et Rome pris fin de cette façon.

 

OOO

 

Il est regrettable qu’Hannibal soit peu connu du grand public car c’était un chef de guerre aussi compétent et doué qu’Alexandre le Grand , Jules César et Napoléon Bonaparte (ce dernier le considérait d’ailleurs comme le plus grand capitaine de l’Antiquité).

Mais l’Histoire se montre parfois ingrate, surtout envers les perdants …

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